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Le guetteur mélancolique
Le guetteur mélancolique
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27 juillet 2010

Poitiers, que s'est-il donc passé le 21 juin ?

procLe jeudi 29 juillet, à 14 heures, aura lieu au Palais de Justice, le rendu du jugement du procès du 8 juillet.

Le tribunal correctionnel doit se prononcer sur la culpabilité de six prévenu(e)s, et sur la demande de la partie civile : une douzaine de policiers, dont le commissaire Papineau (Directeur de la sécurité publique dans la Vienne).

Le procureur et l’avocat de la police ont présenté leurs comptes : il réclament pour 3 d’entre eux : 6 mois de prison dont 4 mois ferme, pour deux autres c’est 8 mois de prison dont 6 mois ferme, et pour la sixième : 70 heures de travail d’intérêt général, le TIG ; pour les dommages-intérêt, c’est 800 euros pour chacun des policiers, à quoi s’ajouterait les frais de justice.

Soit au total, 24 mois de prison ferme, 10 avec sursis et 13000 euros de dommages-intérêts et le forfait de frais à partager entre les prévenus.

Poitiers serait-il devenu un petit “Villiers-le-Bel” ? s’est, à juste titre, scandalisé un des avocats devant cette “facture” proprement ahurissante censée sanctionner outrages, violences et rebellion.

Que s’est-il donc vraiment passé dans la nuit du 21 au 22 juin ? Si la presse a déjà rendu compte du procès, nous pouvons ici, ne serait-ce qu’à l’aide de tout ce qui s’est dit, procès-verbaux compris, lors des dix heures (!) d’audience, repasser l’essentiel du “film” des événements, qui se sont déroulés entre une et deux heures du matin, à l’issue de la Fête de la Musique.

C’est alors que le commissaire Papineau, faisant une tournée d’état des lieux, et débouchant de la rue de la Regratterie sur la place du Marché, dit avoir vu atterrir à ses pieds une canette de verre venant de la gauche, dont il n’a pas vu qui l’avait lancé ; ceci accompagné d’une vive exclamation (“Papineau, on aura ta peau !”).

Aucune reconstitution n’a eu lieu, aucun témoin n’a pu confirmer la responsabilité de quiconque. Par contre le commissaire Papineau, dans l’instant, se fait une idée : il tourne la tête et repère en effet, en face de lui, devant la façade de l’église une personne qu’il dit n’avoir pu identifier à ce moment et qu’il va tenter d’interpeller, alors qu’elle part en courant.

Il s’agit d’une jeune femme, Nina, qui dit avoir vu un policier dont elle peut légitiment craindre qu’il lui en veuille ; en effet, Nina, qui récuse totalement sa propre responsabilité, a déjà par deux fois été l’objet d’interpellations policières, suivies de gardes à vue, puis de procédures, l’une pour refus de prélèvement d’ADN, l’autre pour bris d’une “sucette Decaux”, qui à la finale, se sont toutes les deux conclues par une relaxe.

La police s’est alors sentie à juste titre désavouée et, plutôt que de s’en prendre à elle-même de la faiblesse des dossiers transmis à la justice, a entrepris d’avoir à l’œil Nina, qui désormais a pu craindre une “revanche” si l’occasion d’un prétexte s’en présentait. Et c’est précisément ce qui est en train d’arriver, avec le risque de subir une nouvelle garde à vue, avec tout ce que cela avoir de traumatisant (dont la fouille à corps) et qui lui fait dire au Tribunal : “j’ai eu peur” ; expliquant ainsi très simplement la logique de sa “fuite” puis de son attitude lors de l’interpellation musclée qui va avoir lieu place de la Liberté.

Le “film” s’est en effet brusquement accéléré : le commissaire Papineau ayant entrepris de “courser” Nina, la poursuite se déroule de la rue de la Regratterie à la place de la Liberté. Entre temps, il aura signalé à ses troupes l’action engagée, rameutant une dizaine de policiers, tandis que six proches connaissances de Nina, finissant la soirée à proximité et alertés par cette agitation subite, l’ont rejointe pour savoir ce qu’il en était et débouchent sur la place au moment où elle est en train de faire l’objet d’une “maitrise au sol”, dont la douleur va la faire crier.

Il est facile de comprendre, à la vue de leur amie dans une telle situation, la vivacité de la réaction de solidarité de ces jeunes pour qui cette violence policière-là est au sens propre du terme, insupportable, à plus forte raison en l’absence de toute information sur ce qui peut motiver une telle brutalité.

Les témoignages recueillis sur place, et produits à la barre, ont souligné de la part des spectateurs, d’abord une vive interrogation sur les raisons de ce qui se passe sous leurs yeux, et ensuite et surtout une vive inquiétude sur ce que les jeunes (eux mêmes totalement “mains nues”) subissent de la part de policiers visiblement en pleine forme de “neutralisation” : clé au bras, clé dite d’étranglement et mise au sol, visage contre terre, dont des cris de douleur témoignent de l’efficacité du “traitement” ; seront d’ailleurs médicalement constatés des lésions, plaies, hématomes et un “coquard” que l’intéressé ne s’est sûrement pas fait lui-même.

Enfin, la police qui aimerait bien alors s’en tenir au bon vieux “circulez ! Y’a rien à voir !”, pour refouler les gens trop curieux au-delà de la “zone de sécurité”, joue de la matraque (le fameux tonfa) à leur encontre.

Embarqués au commissariat et mis en garde à vue, les jeunes déjà marqués de coups, en subiront encore d’autres, dont il ont fait état à la barre ; mais comme l’a reconnu l’avocat de la police, avec une rare franchise, dans ces lieux, il est toujours possible qu’il y ait des “ratés” (sic)

Pendant ce temps-là, les policiers prennent la précaution d’aller se faire soigner au CHU, où ils n’arrivent pas à se faire octroyer les ITT (interruption temporaire de travail) qui leur seraient nécessaires pour porter plainte. Il leur faudra alors les obtenir auprès d’un médecin sensible aux difficultés du maintien de l’ordre et compréhensif ; ce qui permettra “l’addition” des dommages-intérêts, mettant du beurre dans les épinards des intéressés et frappant au portefeuille les inculpés.

Lors de la comparution immédiate qui s’est ensuivi, les prévenus ayant demandé un délai pour préparer leur défense, se sont vu infliger une détention préventive à Vivonne, pour laquelle il a fallu une nouvelle procédure pour les sortir de prison, à l’exception d’un seul qui a eu ”droit” (si on peut dire) à pas moins de 17 jours de “geôle”.

Rassemblement devant le palais de justice de Poitiers le 28 juillet à 18 h !
Soutien lors du délibéré, le 29 juillet à 14 h !

Comité poitevin contre la répression des mouvements sociaux – antirep86@free.frhttp://antirep86.free.fr

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